vendredi 20 février 2009

dictionnaire de crise


Voici que sur la route d'un concurrent direct, une autre enseigne de supermarché joue avec le dictionnaire.
Tout est là pour évoquer les belles définitions, jeu de typographies, prononciation et citation inventée. Sauf que des couples de mots ainsi associés (sans tiret) sont, pour ce que j'en sais très rares dans les dictionnaires.
Et puis le temps de lecture en automobile est court, il est difficile de lire tout le texte qui n'est donc qu'une image chargée de porter l'invention des petits princes de la communications : discount utile...
On les imagine dans une salle un peu blanche et vaguement neutre autour d'un café équitable discuter de la nouvelle campagne de publicité pour un client. Les slogans fusent lentement et flottent un instant dans l'air conditionné puis retombent. Et soudain alors que sur le tableau Véléda s'accumulent les restes de deux heures de recherches entrecoupées de cigarettes vite fumées sur le palier venteux d'un immeuble blafard, surgit Le Slogan. Celui qui comme jadis la Force Tranquille avait fait tourner la tête de la France. France Tranquille et discount utile, notre beau pays aux mains de tous ces communiquants ayant loupé à la fois leurs études de droit et leurs études de psychologie. Il ne me reste plus que 9 ans pour acheter une Rolex...

un conseil de Jacques Poli








Je viens de terminer la mise en couleur de ma dernière lithographie. Il faut donc environ une semaine pour le faire, disons tranquillement.
En posant, tout à l'heure un brun rouge sur un bleu tendre, je me suis souvenu que ma manière de laisser une ligne parfois très mince débordant de la première couleur sur la deuxième est un conseil que j'avais eu de Jacques Poli. Cela fait vibrer l'ensemble.
J'ai connu ce dernier à l'école des Beaux-Arts de Rouen et malgré nos centres d'intérêts parfois fort divergents, j'aimais beaucoup parler avec lui.
Il était un grand coloriste c'est une évidence, je ne lui arrive pas à la cheville. 
Enfin c'est amusant de sentir ainsi une présence pointer le bout de son nez. Pourquoi aujourd'hui ? Je ne sais pas.
Je lui dois aussi d'avoir mis à la mer avec l'aide de Philippe Martin un bateau nommé Georges Perec qui alla s'échouer au Danemark. C'est une autre longue histoire...
Voici donc le résultat. les couleurs sont sûrement un peu loin de la réalité, je ne suis pas assez qualifié pour faire des photographies aux couleurs justes.
Voici des détails d'un peu plus près.






Et puis je vous laisse trouver les références c'est parfois tout simplement écrit... C'est donc très facile !!




mercredi 18 février 2009

lumière blanche, eau grise



Une belle lumière égale d'une blancheur étendue m'a permis aujourd'hui de poser de la couleur sur un gris, lui, né de l'encrage lithographique.
De toutes ces couleurs mélangées a émergé un gris subtil d'eau sale qui me permet parfois avec bonheur de très facilement faire descendre une vivacité colorée d'un ton voire deux.
J'aime toujours autant ça.
La radio évoque la mélancolie chez Cioran. Je me souviens d'avoir copié dans son entier et sur l'ouvrage lui-même "aveux et anathèmes" du philosophe. 
J'avais suivi un des anathèmes que je vais essayer de vous redonner de mémoire :
"Démosthène copia de sa main huit fois Thucydide. C'est comme cela que l'on apprend une langue. Il faudrait avoir le courage de traduire tous les livres que l'on aime."
J'aime quelqu'un qui traduit les siens.
Moi, j'avais, jeune étudiant, copié de ma main tremblante le texte sur la typographie de l'édition.
On a la preuve d'amour qu'on peut.
J'ai retrouvé et rangé bien comme il faut ce travail il y a deux jours, dans mon sous-sol sur une étagère et je me suis surpris de n'en avoir perdu aucune page...
Cioran m'a sauvé la vie, il m'a sauvé d'une vie.
Aujourd'hui je ne le lis plus, mon adolescence est loin et ma méchanceté au monde ne me semble plus aussi ardente.
J'ai du travail.



mercredi 11 février 2009

énergumène


Alors que je ne cesse de faire des allers et retours entre mes deux blogs, voici que je trouve dans une revue Science et vie (octobre 1945) des annonces pour apprendre à dessiner. Je me décide à faire plaisir à Patrick un lecteur de ce blog en publiant à nouveau des annonces de ce type.
C'est toujours drôle.
Et puis j'ai repris le travail à l'aquarelle sur la dernière planche. Celle dont les mots enfance, enfant, etc. font la page. J'ai trouvé également un autre énergumène et je vous l'offre. la lumière tombe vite dans les pièces chauffées.
J'écoute François Chaslin parler de Buckminster Fuller et le numéro de Science et Vie y fait aussi allusion. Il ne vous reste plus qu'à aller faire un tour là pour suivre...
http://archipostcard.blogspot.com/
Des fois c'est un peu confus non ?


la salle de classe




Aujourd'hui je suis allé dans un collège de Rouen, le Sacré-Coeur, parler avec des élèves de quatrième de mon travail de lithographe.
Dans la salle de classe, les lithographies aquarellées qui appartiennent maintenant au Fonds Régional d'Art Contemporain de Haute Normandie, sont accrochées comme ça, simplement. C'est toujours drôle de trouver son travail hors des murs de l'atelier. C'est détaché.
Les lithographies sont là grâce à la politique de prêt du F.R.A.C qui permet à des enseignants une mise à disposition du fonds.
Michel Delaunay, qui enseigne là enseigne aussi à l'Ecole Régionale des Beaux-Arts de Rouen et c'est là qu'étudiant je l'ai rencontré pendant ses cours de perspective. Donc nous nous connaissons depuis 20 ans.
Les élèves  furent très intéressés je crois et le panel de questions est toujours aussi drôle à cet âge. Combien ça coûte ? (Merci T.F.1), est-ce que vous êtes comme Picasso ? (Je réponds oui à cette question !) Est-ce que vous en vivez ? Qui vous demande de le faire ? Est-ce que c'est dur à faire ? Mais aussi des questions plus techniques sont abordées et finalement moins le sens du travail. Il semble que ce qui compte surtout c'est le temps que l'on y passe et qui vous autorise à le prendre. Lors des projections vidéo, les élèves sont toujours étonnés que ce soit bien moi qui soit à l'image, ce n'est donc pas un mirage...
Il y a toujours un élève qui pouffe au fond de la classe, des qui veulent partir dès que la sonnerie retentit, des élèves qui me conseillent d'écouter scailleroque !
Mais ils sont sympathiques et pas méchants pour deux sous.
Je ne sais pas ce qui restera de ce rendez-vous. Une envie de dessiner serait formidable. Sait-on jamais...

dimanche 8 février 2009

trois dessinateurs





Puisque je ne peux vraiment m'y mettre, je vous parle de trois dessinateur rencontrés ce matin.
Je les ai retrouvés dans trois ouvrages achetés d'occasion au salon du livre de ma ville. 
Je commence par Sempé. Je lui dois beaucoup à celui-là. Collégien, je me rendis un jour à la bibliothèque et devant mon incapacité à choisir un ouvrage, la documentaliste me demanda ce dont j'avais envie : de rire, de quelque chose qui fasse rire lui répondis-je. Je repartais, merci Madame, avec les aventures du Petit Nicolas et depuis je n'ai plus peur des livres. C'est important je crois.
J'allais oublier ça pendant quelques années (stupide adolescence) et le retrouvai bien plus tard, lorsque de l'envie de croire au dessin à nouveau resurgira mon goût pour ce génie.
Oui, génie.
Sempé c'est l'économie parfois poussée à l'ennui du trait. Un penchant pour les fouettages de lignes en saccades, un remplissage décoratif qui en même temps qu'il noie révèle l'essentiel. C'est simple, pauvre mais jubilatoire comme lui et Reiser savent le faire. J'aime surtout chez Sempé les moments où il doit pour son rire jouer des foules. Et puis l'espace du blanc de la feuille tout juste marqué de trois traits de plume devient ciel, champ, parking. L'espace est conquis et marqué d'un rien mais définitivement saisi.
On pourra aussi parler de son univers, des sujets qu'il aborde, de ses personnages un peu fades et perdus dans les villes et leur milieu petit bourgeois mais ce regard, que souvent à tort on qualifie de tendre parce que sans crime de sang, est souvent d'une violence inouïe celle qui marque les êtres et les empêche de sortir de leur condition. C'est là que ça fait mal, c'est là, oui que c'est drôle !
Alors dès que je vois son nom, je prends. Là c'est une belle petite édition chez Pauvert dans la collection Libertés si magnifiquement mise en page par Pierre Faucheux, un autre génie du livre. J'ai collectionné fut un temps ses mises en page mais la place me manque... Le livre fut édité en 1967 une si belle année.





L'autre dessinateur rencontré ce matin est Topor. Topor c'est Dieu. Un Dieu coquin, inépuisable libérateur, drôle et grave.
Lui, je l'ai vu. Oui. Il était là devant moi exactement à l'image de ce que je pouvais rêver. Et pourtant, comme j'étais stupidement timide je ne lui ai pas parlé. Je mourais d'envie de le prendre par la manche et de l'emmener voir mes dessins lithographiés. Mais non, blocage, blocage de classe, j'étais alors un dessin de Sempé.
Il avait un rire largement pourvu de dents et un cigare d'au moins trois jours usé jusqu'à la bague. Je voudrais que tous les étudiants poil aux dents voient et aiment Topor. Son dessin c'est une manière de nous autoriser à dessiner. Il est à la fois malhabile, gauche et savoureusement panique. Il est le seul à hachurer comme ça jusqu'à ce que la plume cède (Kubin aussi). Lui, le monde petit bourgeois il s'en tape. il ne fait que cauchemarder et ça le fait rire. Nous aussi. Le surréalisme il le bouffe tout cru, passe par-dessus Magritte et les belges et retrouve le moyen-âge et son bestiaire.
Et puis il est acide. Qui se souvient de Lola l'autruche dans Téléchat qui visitait l'exposition "Support Sur Vache "! Merci aussi à Monsieur Xhonneux. 
Alors lorsque ce matin j'ai trouvé Visas pour l'humour aux éditions Denoël avec quelques dessins de Topor je n'ai pas hésité. C'est daté de 1962.




Et voici le troisième : Ronald Searle. Lui je le connais moins mais je dois dire que maintenant j'ai très envie d'en savoir plus ! Voici une édition des aventures du Baron de Münchhausen de Rudolph Eric Raspe publiée en 1968 au Club Français du Livre. mon exemplaire est un peu piteux mais les illustrations sont merveilleuses.
Quelle liberté et quelle fantaisie ! A tous ceux qui pensent que l'illustration est un art mineur pour étudiants qui échouent aux Beaux-Arts voilà bien une manière de leur clouer le bec !
Ça coule, déborde, ça s'éponge dans le papier, ça fuit de partout. C'est limite illisible, mouillé et gras. C'est un peu à la manière de Ralph Steadmann dont on parle un peu moins en ce moment.
Il y a un mélange savant de fonds humides sur lesquels viennent des traits de pinceaux éclairants. Je ne sais pourquoi mais je le rapproche aussi des gravures de Monsieur Pincemin. Oui. Un lavis léger qui met en place et par-dessus, très fort et définitif, sans reprise Paf ! c'est un dessin.
Mais soudain je pense aussi que j'ai vu de beaux dessins de Hubert à l'école. Il faudra qu'on parle de tout cela.






lundi 2 février 2009

Si vous répondez oui



Voici que je retrouve ça au fond d'un tiroir...
Je ne l'ai jamais envoyé ce coupon réponse.
Je pense à Jimmy Corrigan de Chris Ware.
En attendant que la pierre se réchauffe, que le travail reprenne, je plonge mes yeux dans un anaglyphe géant de grotte. On ne sait jamais si au fond du gouffre je retrouvais là, sur le sol humide le désir chaud.
On ne sait jamais.
Et puis je dois m'occuper de Sens.
Dans la vie il faut mettre le temps que l'on a pour du béton brut ou pour des encres liquides. Choisir est une chance.