Puisque je ne peux vraiment m'y mettre, je vous parle de trois dessinateur rencontrés ce matin.
Je les ai retrouvés dans trois ouvrages achetés d'occasion au salon du livre de ma ville.
Je commence par Sempé. Je lui dois beaucoup à celui-là. Collégien, je me rendis un jour à la bibliothèque et devant mon incapacité à choisir un ouvrage, la documentaliste me demanda ce dont j'avais envie : de rire, de quelque chose qui fasse rire lui répondis-je. Je repartais, merci Madame, avec les aventures du Petit Nicolas et depuis je n'ai plus peur des livres. C'est important je crois.
J'allais oublier ça pendant quelques années (stupide adolescence) et le retrouvai bien plus tard, lorsque de l'envie de croire au dessin à nouveau resurgira mon goût pour ce génie.
Oui, génie.
Sempé c'est l'économie parfois poussée à l'ennui du trait. Un penchant pour les fouettages de lignes en saccades, un remplissage décoratif qui en même temps qu'il noie révèle l'essentiel. C'est simple, pauvre mais jubilatoire comme lui et Reiser savent le faire. J'aime surtout chez Sempé les moments où il doit pour son rire jouer des foules. Et puis l'espace du blanc de la feuille tout juste marqué de trois traits de plume devient ciel, champ, parking. L'espace est conquis et marqué d'un rien mais définitivement saisi.
On pourra aussi parler de son univers, des sujets qu'il aborde, de ses personnages un peu fades et perdus dans les villes et leur milieu petit bourgeois mais ce regard, que souvent à tort on qualifie de tendre parce que sans crime de sang, est souvent d'une violence inouïe celle qui marque les êtres et les empêche de sortir de leur condition. C'est là que ça fait mal, c'est là, oui que c'est drôle !
Alors dès que je vois son nom, je prends. Là c'est une belle petite édition chez Pauvert dans la collection Libertés si magnifiquement mise en page par Pierre Faucheux, un autre génie du livre. J'ai collectionné fut un temps ses mises en page mais la place me manque... Le livre fut édité en 1967 une si belle année.
L'autre dessinateur rencontré ce matin est Topor. Topor c'est Dieu. Un Dieu coquin, inépuisable libérateur, drôle et grave.
Lui, je l'ai vu. Oui. Il était là devant moi exactement à l'image de ce que je pouvais rêver. Et pourtant, comme j'étais stupidement timide je ne lui ai pas parlé. Je mourais d'envie de le prendre par la manche et de l'emmener voir mes dessins lithographiés. Mais non, blocage, blocage de classe, j'étais alors un dessin de Sempé.
Il avait un rire largement pourvu de dents et un cigare d'au moins trois jours usé jusqu'à la bague. Je voudrais que tous les étudiants poil aux dents voient et aiment Topor. Son dessin c'est une manière de nous autoriser à dessiner. Il est à la fois malhabile, gauche et savoureusement panique. Il est le seul à hachurer comme ça jusqu'à ce que la plume cède (Kubin aussi). Lui, le monde petit bourgeois il s'en tape. il ne fait que cauchemarder et ça le fait rire. Nous aussi. Le surréalisme il le bouffe tout cru, passe par-dessus Magritte et les belges et retrouve le moyen-âge et son bestiaire.
Et puis il est acide. Qui se souvient de Lola l'autruche dans Téléchat qui visitait l'exposition "Support Sur Vache "! Merci aussi à Monsieur Xhonneux.
Alors lorsque ce matin j'ai trouvé Visas pour l'humour aux éditions Denoël avec quelques dessins de Topor je n'ai pas hésité. C'est daté de 1962.
Et voici le troisième : Ronald Searle. Lui je le connais moins mais je dois dire que maintenant j'ai très envie d'en savoir plus ! Voici une édition des aventures du Baron de Münchhausen de Rudolph Eric Raspe publiée en 1968 au Club Français du Livre. mon exemplaire est un peu piteux mais les illustrations sont merveilleuses.
Quelle liberté et quelle fantaisie ! A tous ceux qui pensent que l'illustration est un art mineur pour étudiants qui échouent aux Beaux-Arts voilà bien une manière de leur clouer le bec !
Ça coule, déborde, ça s'éponge dans le papier, ça fuit de partout. C'est limite illisible, mouillé et gras. C'est un peu à la manière de Ralph Steadmann dont on parle un peu moins en ce moment.
Il y a un mélange savant de fonds humides sur lesquels viennent des traits de pinceaux éclairants. Je ne sais pourquoi mais je le rapproche aussi des gravures de Monsieur Pincemin. Oui. Un lavis léger qui met en place et par-dessus, très fort et définitif, sans reprise Paf ! c'est un dessin.
Mais soudain je pense aussi que j'ai vu de beaux dessins de Hubert à l'école. Il faudra qu'on parle de tout cela.
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