samedi 30 août 2025

Gustave Doré accompagné de Staal, Ferdinandus et Cottin

 Il existe peu de plaisirs plus revigorants que, au petit matin d'un vide-grenier, trouver deux beaux cartonnages du début du XXème siècle dont l'un illustré par l'un des plus grands dessinateurs : Gustave Doré.

En effet, voilà qu'entre dans ma collection d'enfantina, La Légende du Juif-Errant, édition Garnier Frères dont les dessins sont de Gustave Doré. Mon exemplaire est particulièrement bien frais, à part quelques minimes usures de la toile rouge. J'ai même cru à une ré-édition en le découvrant. L'album fut offert en prix de lecture lors d'une distribution de prix en 1903 à un jeune Robert Jeuffrain. Il reçut là un beau cadeau Robert ! Et il fut, lui et sa famille bien soigneux pour que cet album nous arrive en aussi bon état.

On retrouve là tout le talent de notre dessinateur qui, une fois encore, est bien identifié comme tel et non comme graveur, la gravure des bois étant assurée par des interprètes bien nommés et auxquels nous devons rendre hommage : messieurs Rouget, Jahyer et Gauchard. Ils eurent la responsabilité de ne rien perdre de la virtuosité très relâchée et virevoltante du dessin de Gustave Doré. Et ce fut, sans doute, une sacrée responsabilité...Nous aimons ici ne pas oublier ces artisans, véritables interprètes sans qui le message graphique de Doré serait sans doute resté lettre morte. Quel travail ! Quel sacerdoce que de devoir mettre en avant les lignes et de creuser les blancs...

Sinon que dire d'autre que nous n'ayons déjà dit sur ce blog devant la virtuosité de Gustave Doré ici encore démontrée avec force et aussi humour ! Il y a là une galerie de tronches particulièrement drolatiques.  On note des traits plus gras, venant sur-ligner des formes, parfois presque comme des lavis que Victor Hugo n'aurait pas reniés et que les graveurs ont su maintenir avec force. Je remarque que l'encre est très légèrement bleutée, froide ce qui renforce le sentiment de fraicheur de l'édition.

Dans la planche VI, on voit l'ombre du Juif-Errant emplie de figures ainsi que les nuages comme habités de silhouettes étranges. Que c'est beau et audacieux. Il faut donc bien prendre le temps de laisser l'oeil fouiller les images, s'habituer aux traits parfois confus pour que les figures montent des fonds. C'est du très grand Gustave Doré, celui que l'on aime redécouvrir aujourd'hui. 


















Toujours chez Garnier Frères, un autre album exactement du même format, nous donne à lire et regarder les Contes de Madame d'Aulnoy. Là encore l'album est en excellent état. Cette fois, ce n'est plus Gustave Doré qui régale mais un trio formé de Staal, Fernandinus et Cottin pour les huit chromolithographies qui sont, à elles seules, la preuve de la richesse de l'édition de l'époque et un exemple de colorisation par pointillisme (trame aléatoire) qui permettait de faire des couleurs incroyables de sensualité et de vibration ! Que c'est beau et étonnant ! Aujourd'hui, on pourrait faire résonner cela avec de la risographie si à la mode.

Les illustrateurs moins connus ne manquent pas pourtant de virtuosité. Les petites vignettes sont bien menées, à la fois drolatique, joyeuses et précises. On s'amuse tout autant qu'avec Doré. Ils avaient bien de la chance les enfants d'alors d'avoir des livres aussi sophistiqués techniquement et aussi gracieux dans le dessin. Commencer sa vie esthétique avec de telless édition devait tout de même former l'oeil d'une autre manière que la notre.

Pour info (et vous faire perdre la tête) les deux albums me furent vendus pour 10 euros.




















Sarah Kay le retour vintage c'est pour quand ?

 Les gens de ma génération (et sans doute plus les petites filles de la fin des années 70) vont immédiatement reconnaitre ces deux albums et les dessins reproduits. Il s'agit, en effet, de deux albums (trouvés consécutivement) de Sarah Kay. Je m'étonne d'ailleurs que la mode du Vintage n'est pas encore remis de la lumière sur cette production et ce travail d'illustratrice tant ils font partie d'une certaine jeunesse et d'une époque si marquée. Sarah Kay, à la fin des années 70 était partout...partout...

Des albums, des vignettes autocollantes, des trousses, des cartables...Tout était Sarah Kay ! Surtout donc pour les petites filles. Pourtant, je me souviens bien avoir aimé ça aussi ! C'était un monde un peu tendre, un rien baba-cool, un peu anglais, ne montrant que des enfants, souvent des petites filles, un peu toujours dessinées pareil et toujours affublées du même type de vêtements aux couleurs très douces pour ne pas dire mièvres. Enfin...On remarque ce mélange de pantalons pattes d'éph et de broderies fleuries, d'un goût un peu trop prononcé pour les rapiècements et les charlottes surdimensionnées sur la tête de fillettes un rien boudeuses. On ajoutera un panier en osier, des godillots en cuir et on aura fait le tour de la typologie de la petite fille par Sarah Kay. On sentait bien, comment dire...un certain retour.

Mais bon, il est vrai que ce genre de dessin a aussi fait rêver une génération questionnant déjà le monde de la consommation, les astronautes et la bande dessinée à la ligne trop claire pour être honnête. Il ne faut pas oublier que les parents qui achetaient ce genre de monde étaient des babas soixante-huitards. 

Mais j'aime rencontrer de temps en temps Sarah Kay sur les vide-greniers. Et si l'album est propre, je ne résiste pas à l'achat. Il ne me semble pas que Sarah Kay rencontre aujourd'hui un retour en grâce pourtant mérité si l'on considère le goût pour la nature, le monde rêvé des fermes idéalisées, un peu comme le hameau de la Reine de Marie-Antoinette à Versailles. Rien de grave, rien d'important mais c'est ce qui fait aussi le charme et la joie d'y replonger. Devons-nous ici relancer l'envie de Sarah Kay comme on tente de relancer les assiettes à compartiments et la vaisselle en grès marron de cette fin des années 70, début 80 ? Allez ! Aidez-moi !

Relançons Sarah Kay ! On s'amusera à faire un rapprochement étrange dans cette période qui voyait les albums de Sarah Kay sortir en même temps que les albums de photographies montrant aussi des jeunes filles en fleur dans des fermettes à la la lumière trop dorée et floutée là encore pour être honnête : David Hamilton...je dis ça, je dis rien.

On note que les deux albums sont des éditions Hemma, de la première édition en français et tous deux datés de 1978.

Pour en savoir plus sur Sarah Kay et sa créatrice Vivien Kubos qui est toujours en vie, allez là :