lundi 16 septembre 2024

La Libération...et Martin Parr mettra ce livre dans sa collection

 

Il y a des objets éditoriaux qui viennent à vous presque malgré vous, c'est à dire que, a priori, comme ça, vous n'auriez pas cru bon les rencontrer.
Mais voilà, ils arrivent dans vos mains avec une certaine force souvent, bien évidemment liée à leur plasticité, leur étrangeté ou la qualité éditoriale. Et puis ce livre affiche (si j'ose dire) assez vite la couleur, ici ses couleurs : bleu, blanc, rouge.
La Semaine Héroïque ne laisse aucun doute sur son contentement patriotique, sur la joie du retour du drapeau. Et, tout est dit sur sa couverture : date, objet (la Libération de Paris), auteur (Georges Duhamel) et même ce que nous devrions faire de l'ouvrage dans les temps à venir puisque le bandeau nous indique tout simplement notre rôle de lecteur : "...que vos petits enfants retrouvent un jour dans votre bibliothèque..."
Ce fut fait exactement comme prévu sauf que la bibliothèque en question était un simple carton sur le sol rempli de plein d'autres livres....




Bien sûr ce qui saute alors au yeux c'est ce désir de construire directement un témoignage dans l'actualité de l'Histoire et même, soyons clairs, dans l'Histoire de France ! Et cela entre le mois d'Août et le mois de Novembre. Il y avait donc urgence à être ainsi très vite sur le marché des livres d'histoire et d'actualité ! Le livre, en effet a été imprimé en novembre 1944.
S'il est aisé de comprendre la motivation, on reste tout de même interloqués de ce désir si ardent de Maurice Boissais d'organiser ainsi une telle édition aussi vite. La Libération devait être vraiment grande. J'imagine bien comment dans les vitrines des libraires d'alors ce livre devait marquer sa place !
Ouvrons-le.

Dans la préface, Georges Duhamel donne sa définition de la Photographie et, en particulier, de celle de l'instantané. On notera de suite que les photographies ne sont pas attribuées individuellement (il est donc difficile de dire qui a photographié quoi) mais les noms des photographes sont bien indiqués :  MM. Artaud, Doisneau, Jahan, Roubier, Roughol, Serge, Zuber et Mme Suzanne Laroche.








Je n'ai aucune idée par qui ni comment tous ces photographes furent réunis, ni de comment le choix éditorial fut opéré. On note tout de même des photographies très proches des événements, très proches des acteurs, avec parfois des points de vue qui racontent aussi le danger. Soit prises très bas sur le sol, soit au contraire, les photographies sont prises en surplomb depuis une fenêtre. On sent la poudre, la peur, le risque, l'indétermination du futur. En ce sens, c'est très vivant. La Libération prend chair en quelque sorte. Les acteurs restent anonymes à part les personnalités historiques, et j'imagine pour ces parisiens la joie de peut-être se retrouver dans ce livre à sa sortie.

Si on cherche chacun des photographes, il est assez facile de ré-attribuer les clichés à chacun d'eux et de comprendre aussi que ces clichés sont tout simplement, souvent, très largement recadrés...donc, sans doute, avec l'accord des photographes qui d'ailleurs avaient des liens entre eux et sont bien connus pour certains.
Il s'agit donc bien d'une composition.

Pour la pagination, rien de plus simple : une photo plein cadre à droite, un petit texte à gauche qui raconte ce qu'on voit. Efficace !
Comme l'année 2024 est celle des 80 ans de la Libération, nul doute qu'il faille regarder cet objet éditorial avec émotion mais aussi avec l'oeil de l'histoire ce qui ne veut pas dire sans la tendresse d'un moment important et donc sans trop non plus y chercher une quelconque vérité ! Ce livre est un cri, celui d'une Libération, d'un sentiment aussi de fierté bien légitime.

En ce sens, c'est un livre de photographies important, un livre étrange sans doute, vivant certainement et c'est le genre de livres de photographies que j'imagine bien sur les rayons de la collection de livres de photographies d'un Martin Parr ou d'un amoureux de la photographie comme objet du réel, du souffle de la vie.
Un bien bel objet donc.
Et n'oublions pas simplement de tous les remercier.






























dimanche 15 septembre 2024

des chiens, dessins de Barberousse


 

J'ai d'abord reconnu la signature si particulière sur la couverture de ce livre : Fritto Misto et Scampi Fritti au Far West.

La signature c'est celle du dessinateur  Barberousse que les gens de ma génération connaissent surtout, sans doute, pour les émissions enfantines de l'O.R.T.F comme Minizup et Matouvu ou la merveilleuse Reinefeuille dont des images restent gravées dans ma mémoire comme un rien étranges. On voyait aussi souvent ses dessins comiques dans la presse.

Mais, cette fois-ci, je fus bien étonné aux Emmaüs, de trouver ce magnifique album d'une grande fraicheur et qui ne souffre vraiment d'aucune forme stylistique trop marquée par son époque et même semble être incroyablement contemporain ! C'est hallucinant comme tout cela aurait pu être dessiné et imprimé hier soir !

La mise en page surtout est très actuelle avec des vignettes pleines posées dans le blanc des pages faisant de grandes compositions colorées très puissantes. Tout cela est sans doute lié à l'outil de dessin de cet album : le feutre. On devine bien les traits de remplissages, les surcharges sur les lignes, les couleurs franches.

Quant au dessin ! Quelle drôlerie ! Les chiens font penser à des Snoopy sous acide, les cow-boys sont découpés à la hache (un peu comme ceux de Steinberg) et on y reconnait presque parfois l'influence de Satanas et Diabolo, les fous du volant dans le dessin du chien méchant. Là encore, il faut être d'un certain âge...J'avoue que j'aime aussi beaucoup le chien Bastos (Bullet en version originale) de la série Paradise Police....





Tout cela est drôle, frais, et donc réussi graphiquement. Mon exemplaire est en parfait état et ce malgré son âge. Il fut imprimé en 1969 tout de même !

Une belle trouvaille donc qui donne envie de croiser à nouveau cet auteur prolixe ! Merci Monsieur Barberousse pour ce beau moment et pour tous les autres.

Fritto Misto et Scampi Fritti au Far West, Textes de Georges W. Roucayrol et dessins de Barberousse, 1969.

On se demande bien où les auteurs ont trouvés les noms des chiens qui, en italien, signifient : mélange de fritures et langoustines frites...