Dans mon supermarché Leclerc de Saint-Pierre-lès-Elbeuf que je fréquente depuis mon enfance, un rayon Leclerc-Occasion a été ouvert et c'est devenu pour moi un rendez-vous obligatoire à chaque passage pour y faire mes courses.
J'y trouve souvent (mais pas toujours...) de quoi sustenter mes désirs de lecture ou ceux de ma mère. Parfois, j'y trouve même des raretés et la première édition avec bandeau prix Médicis de la vie : mode d'emploi de Georges Perec en est l'exemple parfait. Quelle joie de trouver ce livre dans un état absolument remarquable dans mon Leclerc ! Que dire du fait que je trouve aussi l'étrange livre le nécrophile de Mario Mercier qui côtoie un catalogue sur les gravures de Rembrandt.
Grace à ce rayon, j'ai aussi lu Bourdieu ou...Amanda Lear qui finissent dans les mêmes rayons et parfois le même Caddie. Je dois le dire, j'ai largement préféré le livre d'Amanda Lear à celui de Bourdieu et ce n'est pas une posture de ma part.
La dernière belle surprise fut de pouvoir lire Annie Ernaux évoquant les centres commerciaux directement dans mon centre commercial ! La boucle était bouclée et elle répondait cette boucle à un désir évoqué d'ailleurs par Annie Ernaux elle-même dans son livre.
Depuis quelque temps, je photographie chaque semaine mes trouvailles de livres. Cela agit comme une sorte de portrait d'un lecteur même si tous mes choix ne sont pas pour moi. Mais cela montre aussi que nous sommes dans un pays assez extraordinaire aussi, un pays où la littérature sans hiérarchie aucune est disponible pour tous et pour pas cher. Alors, certes, il faut trier, chercher mais c'est bien cela qui est le signe de notre liberté, de pouvoir ainsi sans remord, sans peur, se procurer des livres. Et le prix permet aussi de se laisser tenter par des ouvrages que nous n'aurions pas achetés sans ce rayon. On y trouve Barthes (Racine), Maupassant, Michel Tournier, Calvino etc...Cela signifie aussi que dans un périmètre autour de ce Leclerc il y a des lecteurs de ces auteurs qui viennent là vider leur bibliothèque. On pourrait rêver qu'un anthropologue ou un sociologue construise une analyse d'un territoire de lecture en parcourant les Leclerc-Occasion de France pour faire des statistiques à la fois des ventes et des achats selon les régions de notre pays !
Trouver Les Versets Sataniques de Salman Rushdie dans sa première édition est la preuve de notre liberté.
Pouvoir lire et découvrir une journée d'Ivan Deinssovitch de Soljenitsyne (absolu chef-d'oeuvre) en est une autre. Et Rimbaud qui finit là...
Parfois, dans les livres, des trésors sont cachés comme cette petite série de cartes postales brodées trouvées dans un John Fante.
Alors, il arrive bien aussi que je ne trouve rien. C'est toujours un peu décevant et parfois j'ai même l'impression dans une paranoïa excentrique que les responsables du magasin retiennent des livres dans leur grotte. Il m'arrive de fantasmer des retenus de livres, d'avoir envie d'aller directement à la source. Et quand deux ou trois semaines de suite, je ne trouve rien, je suis comme frustré, déçu. Et puis soudain, on sent qu'un lot est arrivé, que le rayon a été rechargé ! Il m'arrive même de placer des livres-témoins dans les rayons pour voir si ils bougent, preuve alors d'un nouvel arrivage. Un Boris Vian m'a ainsi servi de repère pendant un mois avant de disparaitre, ayant donc trouvé un lecteur ou une lectrice. On note que parfois certains livres sont en plusieurs exemplaires (Maupassant par exemple ) signe sans doute d'une lecture collective peut-être scolaire...
Alors voilà quelques photographies de mes Caddies remplis chaque semaine. Je compléterai au fur et à mesure. Vous pourrez ainsi suivre plus ou moins mes lectures, mes choix mais aussi mes courses !
N'en tirez pas trop vite des conclusions sur mes goûts mais vous n'avez pas tort : Justin Bieber et Klaus Nomi sont bien des artistes que j'aime.
Pour peut-être compléter avec jubilation cet article, je vous conseille l'écoute de l'excellente émission sur l'écriture plate avec Laelia Veron et Clara Cini. C'est formidable.